1794 - Histoire de Mosset

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1794

XVIIIe siècle > Révolution > 1795

Mosset en 1794

Après l'année terrible de 1793, le calme revient à Mosset. La municipalité traite les problèmes habituels concernant l’élevage des ovins, une des principales activités locales, et assure, tant bien que mal, les services communaux. Mais la guerre avec l'Espagne se poursuit et Mosset est mis à contribution : au delà des jeunes qui y participent, les forces économiques locales sont sollicitées : les moyens humains et matériels disponibles sont souvent réquisitionnés. Enfin la pénurie est réelle : le vin manque et la mendicité ne régresse pas.

La Picote
Le 25 germinal an II (14 avril 1794), le maire Joseph Prats expose, devant son Conseil Général, que "différents citoyens de cette commune ont fait venir leurs troupeaux [d'ovins] sans en avertir la municipalité," sans aucun contrôle et certains "sont infectés de la maladie contagieuse appelée le picote."
La picote est une forme de variole animale qui correspond au cowpox britannique, Elle est assez fréquente au XVIIIe siècle et Mosset n’y échappe pas.
Il est donc décidé que les bestiaux concernés seront inspectés tous les 15 jours pendant 40 jours. En cas d'infection les propriétaires seront condamnés. Sont concernés Pierre François Arrous (1754-1795), March Ruffiandis (1740-1815), Jacques Sales (1727-1804), Jean Ponsaillé (1762-1824), Valentin Blanquer (1734-1805) et Jacques Galaud (1768-1843).(1)
Le 24 septembre 1794 c’est Dominique Dimon (1727-1798) qui est sur la sellette ; son troupeau est atteint. Le Conseil décide que "le troupeau infecté de la maladie restera à la bergerie que Dominique Dimon détient à Saint-Barthélemy. Il sera obligé d'enterrer toutes les bêtes qui seront mortes conformément à la loi." Quelques jours plus tard Jacques Cossey (1738-1813).est dans le même cas.(2)

Fraternité et intérêt communal
Le 21 avril 1794, se sont présentés devant la municipalité Jean Deixonne, Jean Surjus (1772), Baptiste Deixonne d'Urbanya. Ils demandent l'autorisation d'introduire leurs bestiaux dans une partie des pacages du territoire de Mosset.
"Après avoir pris des renseignements sur ces propriétaires et voulant donner des marques de fraternité avec les habitants d'Urbanya et entendu que les bestiaux de cette commune ont beaucoup diminué, nous leur avons donné la permission, à partir du 1er novembre dernier, moyennant la somme de 675 livres à verser le 1er novembre prochain."

troupeau de brebis

Pour protéger la forêt, ils ne devront introduire aucune chèvre et les bergers ne devront apporter aucune hache. Les intéressés ont accepté ces conditions.(2)
Le pacage apporte à la commune de Mosset des revenus importants : 1517 francs en 1794 soit grossièrement le tiers des recettes communales.(3) Il est donc indispensable d'attirer les troupeaux étrangers… bien entendu dans le plus sincère esprit de fraternité.

Garde champêtre et garde bois
Quelques jours plus tard (15 floréal an II), la commune qui se trouve sans garde champêtre ni garde bois nomme à ces postes Pierre Olio (1757-1827). Il n'est pas riche et ne possède que 2 ânes et un cochon pour élever 3 enfants. Un salaire annuel de 300 livres versés en 4 payements égaux lui est accordé. Conformément à la loi de police rurale Olio devra prêter serment devant le juge de paix de Mosset pour la fonction de garde champêtre et devant le tribunal du district pour la fonction de garde bois.
Après avoir accepté Olio a-t-il estimé que la tâche est trop lourde et le salaire insuffisant ? Mettant peut-être en avant le principe du "travailler moins pour gagner plus," non seulement son salaire est porté à 350 livres mais il partage la tâche avec Jean Baptiste Gaspar (1751-1808), ancien garde forestier de  d'Aguilar, engagé dix jours plus tard comme garde supplémentaire aux mêmes conditions.(4)

Indemnités et absences pénalisées
Le 30 fructidor an II (16 septembre 1794), le Conseil Comunal a arrêté qu'il s’assemblera 2 fois par décade à 6 heures du soir et le jour de décadi. à 1 heure de l'après-midi. Le décadi est le dixième jour de la semaine du calendrier révolutionnaire. Il est le jour de repos comme l’était le dimanche du calendrier grégorien. En se réunissant 3 fois par tranches de 10 jours le Conseil Communal délibère donc 108 fois par an.
En 1794, Jean Ruffiandis, reçoit comme membre du Conseil Communal une indemnité annuelle de 24 livres et 24 sols, soit 501 sols,(3) soit un peu moins de 5 sols par réunion.
La présence de tous les membres étant jugée indispensable, les absents se voient infliger une amende de 25 sols 5 fois plus forte que l’indemnité de présence. .
Selon Wikipedia, "en 1787 le pouvoir d'achat d'un Sol est approximativement celui d'un Euro de 2005," l'indemnité serait de 5 Euros et l'amende de 25 Euros.

En manque de vin
Le sept fructidor de l’an II (22 août 1794), le maire Joseph Prats expose, devant le Conseil Général, que "le vin manque totalement dans cette commune et les aubergistes n’en trouvent pas dans les communes où ils vont avec des bons que la municipalité de Mosset leur délivre."

Culte de la Raison
Le 17 mars 1794 inauguration du culte de la raison en l'église cathédrale de Perpignan. (5
)
La "religion" centrée sur le Culte de la Raison se propose de  rassembler tous les peuples sous la devise de la liberté et de l'égalité. Les édifices religieux deviennent des temples de la raison. Cette inauguration à Perpignan se situe à la fin de la Terreur et juste avant le nouveau Culte de l'Être suprême.

Mendicité
Les communes reçoivent une aide financière  pour participer à la disparition de la mendicité et de l'indigence. A Molitg une trentaine de familles ou de veuves reçoivent de 5 à 20 livres chacune pour un total de 130 livres.(6) Rappelons que le prix de la journée de travail varie en fonction de la saison de 1,25 à 1,5 livre. L’aide apportée va donc de 3 à 16 journées.

Réquisitions (2)
La guerre avec l’Espagne se poursuit au-delà de la frontière. Les Mossétans  de la commune qui ne sont pas sur le front des hostilités sont souvent contraints d’apporter une aide logistique.

Mulets confisqués
Le 31 août 1794, les mulets ont été confisqués pour les convois de l'armée. Leurs propriétaires se plaignent de ne plus pouvoir ramasser leurs récoltes et demandent donc un secours.

Réquisitions d'artisans
Le 10 septembre 1794, les artisans sont réquisitionnés. À Mosset sont concernés :
- les menuisiers : François Estève (1767-1821), Gaudérique Laguerre (1751-1833), Louis Oliver (1759-1832),
- les maçons :  Isidore Radondy (1753-1824), Isidore Soler (1748-1811) et Baptiste Palau (1769-1836)
Ils se rendront, sans délai, à Perpignan pour travailler à la fabrique des poudres et salpêtre.
Pour essayer  de retarder ces départs, il est observé que "ces artisans ne travaillent pas en permanence de leur métier, qu'ils ne sont pas très habiles, qu'ils sont la plupart du temps occupés à la culture de la terre et que la récolte n'est pas encore faite sur tout le territoire."
Dans la perspective de ce déplacement et pour se mettre à l’abri d’éventuels ennuis à Perpignan où ils ne sont pas connus, François Estève et Isidore Radondy demandent et obtiennent un certificat de civisme.
Par ailleurs, Maurice Matheu, fermier des forges, s'est présenté devant le Conseil et a exposé qu'il lui fallait deux ouvriers dont un menuisier et un maçon pour réparer et rebâtir sa maison  du 7 Escaler del Jutge  qui a été incendiée.

Réquisition de charbonniers
Le 14 septembre 1794, à la demande du citoyen Lacroix commis du citoyen Royer, commissaire des poudres et salpêtre, tous les citoyens qui font du charbon sont requis afin qu'ils fournissent la quantité de charbon nécessaire aux besoins du citoyen Fourquet, martinaire, qui doit fabriquer des clous pour la République.

Réquisition de voituriers
Le 2 octobre 1794, le fermier des forges Maurice Matheu exhibe l'ordre de réquisition des voituriers qui devront transporter des charbons qu'il tient à la montagne.
Sont pour cela requis les citoyens du tableau ci-contre. Ils doivent faire le transport du charbon de la montagne aux forges de Mosset
Le commis des forges indiquera par roulement tous les 3 jours les noms des voiturier requis.

Non cumul des fonctions
Conformément à la loi du 15 octobre 1794, François Séguy (1771-1797) secrétaire de la municipalité, est obligé de donner sa démission parce qu'il exerce également les fonctions de greffier du juge de paix. Le 3 novembre 1794, le Conseil Général Communal accepte cette démission.

Vols d’oignons
Le 30 août 1794, la municipalité constate que des oignons ont été volés dans les champs. Conformément à la coutume ancienne, ceux qui cueillent des oignons ou des raisins seront punis : l'amende sera de six livres et de 22 heures d'emprisonnement.

Réparations de la fontaine
Le 3 novembre 1794, la fontaine qui donne de l'eau dans la commune est très "malpropre. Une partie des canaux qui l'alimentent sont à ciel ouvert et les portes ne sont pas fermées. Si cette situation perdure cette source d'eau tarira." De plus "elle fera du mal à ceux qui la boiront ainsi qu'aux bestiaux qui s'y abreuvent."
Pour y remédier, la municipalité mettra en œuvre les moyens nécessaires. Elle fera aussi mettre des affiches pour informer ceux qui voudront "entreprendre l'accommodage des portes."

Fontaine vers 1970
La fontaine de Dalt sans les personnages
Sol de 1767
Sol de 1767

La livre de pain à quatre sols
Le 20 décembre 1794, conformément à la loi du 19 brumaire an III (9 novembre 1794), le prix de la livre de pain reste fixé à quatre sols, attendu qu'une mesure de seigle donne ordinairement 30 livres de grains.(7) Ce prix est le prix maximum fixé dans lecadre du contrôle des prix mis en place par l’Etat pour lutter contre l'inflation.
En appliquant la règle 1 sol égale un Euro, la livre de pain serait à 4 Euros.


Sébastien Escanyé (1759-1832) contre-révolutionnaire ?

Un an après son départ de Mosset, prisonnier des Espagnols puis libéré, l’ex-député Sébastien Escanyé est soupçonné contre-révolutionnaire. Il est recherché par la police, qui diligente une perquisition chez ses parents à Mosset au 1 Escaler d'En Dolfe où il est né le 24 mars 1759.

Pose de scellés
"Aujourd'hui, 13 messidor de l'an second de la République [01/07/1794] à l'heure de midi, nous Joseph Porteil (1752-1824), juge de paix et officier de police du canton de Mosset et conformément à une réquisition du citoyen Baranda, maréchal des logis de la Gendarmerie Nationale de Prades, en date du 11 du courant et conformément à un arrêté du représentant du peuple Chaudron Rousseau, je me suis transporté, assisté du citoyen François Séguy (1771-1797), notre greffier, et de Joseph Estève (1760-1837), agent national, et en présence de Sauveur Barrèra, gendarme résidant à Prades, à la maison du citoyen Joseph Escanyé (1726-1796) pour y mettre des scellés sur tout les papiers et effets [de son fils] Sébastien Escanyé..
Nous avons trouvé le citoyen Melchior Bonpeyre (1767-1826) [Beau frère de Thérèse Parès, épouse de l'ex-député] et la citoyenne Catherine Sarda," mère du député.

De suite… nous avons procédé à l'apposition des scellés sur une armoire dans laquelle nous avons fait mettre tous les papiers appartenant au citoyen Joseph Escanyé et sur le tiroir d'une commode" où il y avait d’autres papiers lui appartenant.
Dans "une autre chambre et nous avons apposé notre sceau à un petit buffet dans lequel il y avait quelques effets de Thérèse Parès" (1758-1823) puis... "à de petits tiroirs de ce buffet et à une petite armoire dans laquelle il y avait des effets appartenant au citoyen Joseph Escanyé..." et encore à une autre petite armoire.
Nous avons trouvé une malle dans laquelle il y avait des effets des citoyens Joseph Escanyé et Joseph Sébastien Escanyé [Curé, 1764-1839, frère de Sébastien]. Nous n'y avons point mis les scellés."

Perquisition le 2 juillet 1794

Le jour suivant les mêmes personnes ont procédé à la levée des scellés et à la perquisition.
."Nous n'y avons trouvé que des papiers appartenant au citoyen Joseph Escanyé et après les avoir bien examinés, nous avons reconnu qu'il n'y avait aucun papier suspect." De même dans la chambre de la citoyenne Thérèse Parès, "nous n’avons trouvé que quelques nippes... Nous n'y avons trouvé aucun papier suspect ni aucun papier contre-révolutionnaire mais, au contraire, des papiers relatifs au commerce dudit Joseph Escanyé." (8)

Quelques jours plus tard prend fin le régime sanguinaire de la terreur ; Robespierre esr décapité le 28 juillet. Sébastien Escanyé peut sortir de la clandestinité. En 1795, il revient à Vinça, où il devient  jusqu'en 1800 président de l'administration municipale du canton de Vinça.(9) Après le coup d'État du 18 brumaire, maire de Vinça, il est nommé le 7 nivôse an 9 (28 décembre 1800) il est membre du conseil général où il représente  son canton jusqu'en 1815.

1 Escaler d'en Dolfe
1759 epigraphe du 1Esxcaler d en dolfe
Escaler d 'en Dolfe dessin de Ruffia,dis

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Références

1 - 100EDT31
2 - 100EDT35
3 - L1405
4 - 100EDT34

5 - Rolland Serras Brial - L'incivisme des Roussillonnais sous la Révolution - 1995
6 - L666
7 - 100EDT36
8 - L405


9 - L1025

 
Mis à jour le 13/02/2018
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