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Objectifs ambitieux
Le 29 prairial an VIII (19 juin 1800) le préfet du Département demande à Isidore Lavila, nommé depuis cinq mois, d'adresser tous les mois au Sous-préfet de Prades un rapport indiquant, à l'aide d'un tableau à remplir et commenter, divers éléments sur la situation de la commune et essentiellement " la connaissance de la population, les délits champêtres, la mendicité, l'instruction publique, la surveillance sur la rentrée des contributions."
Le tableau indiquera le nombre des naissances, des décès et des mariages ( respectivement 47, 36, et 21 pour le canton, ce qui couvre vraisemblablement plus d'un mois), la nature des délits champêtres, leurs causes (vols de récoltes, dévastations de propriétés ou de forêts). "La mendicité est un fléau des corps politiques et il est du devoir d'un bon administrateur d'en arrêter les progrès. Il est bien intéressant que je connaisse l'état de la mendicité dans votre commune, si les mendiants qui y circulent sont valides ou infirmes, si ses progrès sont l'effet de la misère ou de la rareté des travaux."
"Le rapport qu'a l'instruction publique avec les mœurs et la prospérité d'une nation, exige qu'elle soit l'objet de votre sollicitude et de votre surveillance. Il est donc essentiel que je connaisse tous les mois l'état de l'instruction publique dans votre commune, s'il y a une école, si elle est fréquentée, ce qu'on y enseigne, quelles sont la moralité et la capacité de l'instituteur, quels sont les causes qui ont empêché et empêchent encore cet établissement."
Signé Salut et fraternité Charvet (ADPO 100EDT33)
La réponse du maire - Ses suggections pour l'école
Cinq mois après sa nomination et un mois après la directive qui précède le maire répond le 23.7.1800 (4 thermidor an VIII).et propose des solutions au sous-préfet. Il reprend à son compte les objectifs fixés et demande au Préfet d'aller plus loin en matière de sécurité et d'intensifier les actions en faveur de l'école.(ADPO 2Op2254)
L'instruction publique
"L'instruction publique est entièrement négligée dans cette commune. Depuis longtemps elle est sans instituteur. Les pères et mères ne connaissant pas, par eux-mêmes, le prix attaché à l'instruction, qui joint à l'intérêt particulier, refusent de sacrifier pour leurs enfants un salaire honnête qu'ils devraient donner à un instituteur, et ils préfèrent qu'ils restent toujours dans l'ignorance. Le seul moyen à prendre à présent pour faire revivre l'instruction publique, serait, il me semble, de demander au gouvernement de faire accorder un fonds par le trésor public, ou permettre à l'Arrondissement communal ou à chaque commune, d'imposer au "marc le franc (1)" sur les rôles des contributions une somme fixe de deux à trois cent francs. Elle serait destinée au salaire de chaque instituteur et le restant serait supporté par les élèves qui fréquenteraient les écoles, à l'exception de ceux qui seraient reconnus indigents, qui devraient être exemptés de ce payement.
Je crois que cette mesure réussirait pour encourager des pères à faire instruire leurs enfants, surtout lorsqu'ils ne devraient pas payer une forte somme aux instituteurs."
Les gardes champêtres
"En entrant en fonction de maire, je n'ai pas trouvé de garde champêtre en exercice et j'ai eu beaucoup de peine à en trouver pour empêcher les délits de tout genre qui se commettent aux propriétés soit particulières soit communales. Depuis le 1er messidor dernier, deux gardes champêtres sont en activité ; depuis il n'a été dénoncé aucun délit rural et je n'ai pas eu de plainte de la part des particuliers. Je pense que la nomination des dits gardes et les tournées qu'ils font empêchent les malveillants de se porter à commettre des délits."
La mendicité
"La mendicité dans cette commune a beaucoup diminué depuis le commencement de la Révolution, soit par rapport à la suppression de la dîme et des droits féodaux, soit à raison de l'augmentation du prix des journées depuis le commencement de la guerre. Le petit nombre de mendiants qui se trouvent sont des vieillards ou des enfants que leurs forces ne leur permettent pas encore de travailler. Je crains cependant que le nombre viendra bientôt à augmenter, soit à raison des mauvaises récoltes où nous sommes menacés provenant de l'intempérie des saisons, soit enfin par la débauche et les jeux qui se font journellement aux cabarets et surtout par les citoyens de la classe indigente et les gens de famille."
Les cabarets
"Je pense que pour obier en partie à cette débauche vous devriez donner un arrêté en rappelant les lois y relatives et ordonner aux
Joseph Manaut - Garde champêtre
Le garde champêtre embauché en mai 1800 est Joseph Manaut (1750-1806) dit Barnoye. Il est le fils de Miquel Pau Manaut (1708-1776), clavaire en 1758, c'est à dire garde champêtre, et de Anna Prats. Son salaire est de 100 francs par an.
En 1803 il est mis en prison à la suite d'une intervention musclée dont ont été victimes Marie Deixone (1770-1848) et sa fille Marguerite Basan (1786-1853). Le maire écrit, à la demande de renseignements de la justice : "Joseph Manaut se trouve porté sur la matrice du rôle de la contribution foncière pour un revenu de 11 francs. Les propriétés qui forment le revenu appartiennent en leur majeure partie, à ses 2 enfants en bas âge, qui les ont reçues de leur mère décédée. Il n'a pour gagner son pain et celui de ses enfants d'autre ressource que le produit de son travail journalier. En conséquence, nous déclarons que Joseph Manaut est des plus indigents de la commune."
En 1804, alors qu'il n'est plus garde champêtre il est impliqué dans une affaire de défrichement clandestin de la forêt seigneuriale.
En 1806, il veut récupérer son habitation du 7 El Plaçal pour y loger sa fille, habitation qu'il avait reçu, en 1796, en échange, avec Isidore Radondy. Une sévère altercation l'oppose au locataire François Ribot. On retrouve Joseph Manaut inanimé au bas de l'escalier. (JDM N°43 de mai 2005).
maires et adjoints de veiller et traduire par devant les tribunaux compétents les cabaretiers qui après dix heures du soir l'été et neuf heures l'hiver se permettent à jouer, manger et boire chez eux et ce, sous une peine pécuniaire, qui vous paraîtra de fixer. Par ce moyen on parviendrait à éviter beaucoup de troubles qui se commettent pendant la nuit, où il est presque impossible de les éviter, surtout lorsqu'ils sont commis par des gens qui sont ordinairement dans la débauche."
Les contributions
"Le recouvrement des contributions est assez avancé, bien que la récolte soit tardive dans notre territoire à cause du climat et que les seules ressources qu'on ait pour se procurer de l'argent est le produit du blé seigle et des laines.
Le 2 messidor, la moitié des contributions de la courante année se trouvait payée au préposé du Receveur Général ainsi que tout l'arriéré des années antérieures.
Signé : Lavila Maire
PS : J'ai reçu votre arrêté qui nomme les membres du Conseil Municipal de cette commune et j'ai donné de suite connaissance à chacun des membres qui le composent." (2OP2254)
(1) Marc le franc Le "marc" était une très ancienne mesure servant principalement à peser les métaux précieux. A une époque où les monnaies étaient souvent manipulées, leur poids en argent était donc essentiellement variable selon les besoins financiers des monarques qui les émettaient. Leur valeur était appréciée par les marchands et par les banquiers par rapport à la valeur du marc d'argent. De nos jours, lorsqu'une vente forcée ne permet pas de désintéresser tous les créanciers d'un même débiteur, l'autorité qui procède aux règlements remet à chacun d'eux un pourcentage du montant de sa créance calculée en fonction du rapport entre la masse totale du passif et le produit net de la vente. Dans le jargon judiciaire, ce procédé est appelé une distribution "au marc le franc".
Matheu Jauze, premier instituteur du XIXe siècle
Isidore Lavila (1758-1825) nommé maire en 1800, met ses actes et ses idées en conformité. Le 27 septembre 1801 (5 vendémiaire an X) il écrit :"Le maire de la commune de Mosset, d'après la bonne conduite, la moralité, le zèle avec lequel le citoyen Matheu Jauze de la commune de Saurat, Ariège, demeurant dans cette commune depuis 2 ans, s'est conduit et particulièrement depuis 7 mois qu'il fait les fonctions d'instituteur de la commune, ainsi qu'il est reconnu par le progrès des élèves qui ont fréquentés son école. Je nomme le dit citoyen Matheu Jauze pour remplir les fonctions de secrétaire de la mairie, en lui attribuant le traitement de 150 francs par an, ainsi qui a été fixé par le conseil municipal, moyennant que le dit Jauze continuera de remplir les fonctions d'instituteur et se faira approuver par le sous préfet d'après l'avis du jury d'instruction de cet arrondissement conformément aux lois y relevant. " (ADPO 100EDT37)
L'accord du jury sera obtenu le 30 septembre 1801 (8 vendémiaire an X).
Matheu Jauze n'était pas de Mosset. Il était né à Saurat dans l'Ariège.
Depuis le début du XVIIIe siècle des Jauze de Saurat s'étaient installés à Mosset. Sauveur Jauze y avait épousé Cathrin Cayrol en 1758. Ils eurent 4 enfants dont François dit "Gascou" qui se marie à Baronique Pares. L'instituteur est probablement un cousin.