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Les ressources du sous-sol de la commune de Mosset
Où il est question des retombées quasi immédiates mais malheureusement avortées de la réussite du Baron dans l'économie de la vallée
Mis en appétit par les gains engendrés par la "poudre Chefdebien" et le rôle majeur tenu par le talc du Caillau, un certain nombre d'industriels s'intéressèrent de très prés à l'éventuelle richesse minéralogique de la vallée de la Castellane. C'est ainsi que dès 1885 (le Baron n'exploite la carrière que depuis 2 ans !) un industriel, dont le nom est tenu secret, est prêt à verser à la commune 5 F par tonne de talc extrait de tout gisement se trouvant sur les terres communales. Ce monsieur s'appuyait sur une quasi-certitude géologique confirmée, en 1886, par Monsieur Braconnier, ingénieur des Mines à Prades :
"Le talc du Caillau formant une couche intercalée entre des calcaires dévoniens * (auet un filon ferrugineux) au calcaire et fer que l'on retrouve au pied de la Tour de Mascarda il y a des chances sérieuses pour que le talc exploité chez Monsieur Chefdebien se rencontre en puissance exploitable dans les terrains communaux de Mosset "
Dans la même missive adressée au sous-préfet de Prades, M. Braconnier évaluait le prix de revient du talc exploité à Mosset :
"Extraction : 2 F/tonne
Transport à l'usine de Prades (moulin à talc) 13 F/tonne
Montant des frais généraux, transport à la gare : 15 F/tonne
Ensemble : 30 F/tonne extraite. le prix de vente étant alors de 45 F sur wagon à Prades, le bénéfice serait de 15 F/tonne "
Apparemment, les quelques recherches entreprises ne donnèrent aucun résultat probant.
C'est alors qu'en janvier 1887, le Maire, Jacques Ruffiandis, reçoit une nouvelle offre. Elle émane de MM. HOLTZER, DORIAN et Cie, propriétaires des "Hauts Fourneaux de Ria". Ce n'est pas seulement le talc qui intéresse ces messieurs mais "tous minerais se trouvant dans les vacants communaux ".
Par ailleurs, ils s'engagent à effectuer toutes recherches à leurs frais et à construire les chemins nécessaires à la prospection puis à l'exploitation en laissant le "droit de passage aux habitants de Mosset." Dans le cas où la société cesserait d'exploiter les carrières découvertes, elle verserait une redevance égale à la moyenne des redevances des années précédentes.
Durée du contrat : 20 ans
Redevance perçue par la commune : 50 centimes par tonne de minerai vendable.
Malgré la modicité de la redevance, le Conseil vota à l'unanimité : Ces messieurs étaient connus dans le Conflent, ils s'engageaient, en cas de succès, à utiliser la main d'œuvre locale et cette nouvelle industrie ne manquerait pas de revitaliser l'économie de la vallée.
Mais patata ! Alors que le 8 mars 1887 le Préfet s'apprête à agréer la délibération du Conseil Municipal, entérinant le choix, par la commune, de la Société des Hauts Fourneaux de Ria, ne voila-t-il pas que la veille de cette date fatidique un habitant du village (un certain BRUNET) en piochant son lopin de terre prés de la route, à 2 km à l'ouest de Mosset, met au jour un gisement de talc qualifié par un adjoint dépêché sur place de "très important et d'exploitation aisée". Aussitôt alerté, le maire s'empressa d'envoyer un courrier angoissé au Préfet :
"Le 27 janvier dernier, j'ai eu l'honneur de transmettre à M. le Sous-préfet pour être soumis à votre approbation une délibération du C M de Mosset par laquelle cette assemblée concède à la Cie des Hauts Fourneaux de Ria les terrains communaux pour y exploiter les minéraux qu'elle pourrait y découvrir. Lorsque le CM. a fait cette concession aucune trace de minéral exploitable n'avait été aperçue sur les terrains communaux, de sorte que l'assemblée municipale, considérant que la Cie serait obligée de faire des dépenses pour pratiquer des fouilles qui pouvaient rester stériles a demandé une somme excessivement minime et cela afin que la société exploitante put, pendant les 20 années que devait durer la concession, rentrer dans les fonds qu'elle aurait hasardeusement dépensés pour faire des recherches. Aujourd'hui, il n'en est plus ainsi ; la Cie de Ria n'aura aucune dépense aléatoire à faire puisqu'un individu de Mosset a découvert, à fleur de terre, un gisement de talc sur le terrain communal, de sorte qu'il me paraît que si la délibération n'est pas encore approuvée, il peut être fait un traité dans des conditions plus avantageuses pour la commune.
La population de Mosset critique fort la délibéprise par le CM, disant que la concessuion a été faite à la légère et que le CM. a bradé les intérêts communaux.
Ces faits me font un devoir de vous prier de vouloir bien avoir la bonté de surseoir à l'aprobation de la délibération du CM. relative à la concession du droit d'exploitation des terrains communaux afin que je puisse faire faire de sérieuses fouilles et m'assurer si réellement le gisement qui a été découvert est riche en miné exploitable... "
Malheureusement, la lettre arriva trop tard, le Préfet ayant agréé la susdite délibération.
Heureusement (si l'on veut !) le filon "si bien placé" s'avéra n'être qu'une simple lentille de talc de quelques dizaines de kilos et, à ce jour, les recherches entreprises par les défunts "Hauts Fourneaux de Ria" n'ont toujours pas abouti.
De même, le gisement découvert en 1906 par Casimir NOT (1873-1912) et que ce dernier voulait exploien offrant la même redevance de 50 centime était trop limité.
Sachez qu'après la guerre de 14 on a cherché et trouvé d'autres veines minéralogiques dont une d'OSMIUM, métal servant alors à la fabrication d'ailes d'avion ? Mais, là non plus, il n'y a pas eu d'exploitation industrielle.
Enfin n'oublions pas la mine à ciel ouvert de Sant Barthomeu dont le Feldspath était encore exploité dans les années 1990 !
*Dévonien : étage de l'ère primaire datée d'environ 380 millions d'années
Jean LLAURY